vendredi 19 juin 2009

Un stade de 30 000 places à Nanterre en 2014 ?

Mardi 16 juin se tenait salle Le Corbusier (Parc-Nord) une réunion d’information sur le projet de construction d’un stade de 30 à 40 000 places sur l’emplacement de l’actuel stade des Bouvets, dans l’alignement de l’Arche de La Défense.

En quelques mots, il s’agit d’un projet privé piloté par le club de rugby «Racing Métro 92», l’un des plus prestigieux clubs français. Le stade envisagé serait en fait un équipement polyvalent, susceptible d’accueillir aussi bien des rencontres sportives que des concerts ou des spectacles pour des publics allant de 5 000 à 40 000 spectateurs. Nanterre est choisi à cause de la proximité de La Défense est de son excellente desserte par les transports en commun. Le projet n’est pour l’heure qu’en phase préparatoire. En effet, si le terrain est situé à Nanterre, le stade des Bouvets appartient à Puteaux et l’EPAD a son mot à dire en termes d’urbanisme. Il faut donc trouver un accord de principe à quatre entre Nanterre, Puteaux, le club et l’EPAD-EPASA. Sitôt cet accord trouvé, les premières études d’impact et les consultations publiques pourront être lancées. La Mairie a néanmoins tenu à informer les habitants dès à présent, ce dont on ne peut que la féliciter, tout en souhaitant qu’elle saura maintenir tout au long du projet ce bel élan participatif.


La réunion, présidée par Patrice MARCHAL, rassemble plusieurs autres élus (MM. PERREAU-BEZOUILLE, MAZOUTI, VIGNAU, BEN AMAR) et même M. JARRY, arrivé presque à l’heure. Hors élus et personnels municipaux, l’assistance compte vingt à trente personnes. Un écran, un vidéo-projecteur et des micros sont installés. Les murs sont décorés d’affiches et de fanions aux couleurs du club «Racing Métro 92».

Patrice MARCHAL, puis Gérard PERREAU-BEZOUILLE introduisent brièvement la séance en insistant sur la volonté qu’a la Mairie d’informer et de consulter les habitants très en amont sur un projet porteur de belles opportunités, mais aussi d’inconvénients potentiels pour les riverains. La municipalité, soulignent-ils, est favorable à ce projet privé, mais elle souhaite être partie prenante plutôt que de le «subir». Les responsables du projet prennent ensuite la parole.

Le premier est M. BOUCHER, directeur général adjoint du club. M. BOUCHER présente d’abord le «Racing Métro 92» (1). C’est l’un des clubs de rugby les plus anciens et les plus titrés de France. Il compte des joueurs comme David GERARD, Patrice COLLAZO ou Sébastien CHABAL et comme entraîneur Pierre BERBIZIER, qui fut entraîneur de l’équipe de France. Le club a aussi une vocation de formation, avec une école rassemblant près de mille élèves et l’organisation d’un tournoi destiné aux jeunes, le challenge Yves du Manoir. Depuis peu, le RM92 a rejoint le Top 14, l’élite des clubs français.

L’un des objectifs du RM92 est d’acquérir son autonomie financière en étant propriétaire d’un stade où il jouera et dont l’exploitation lui permettra de se financer. Cette ambition est à l’origine du projet présenté. Elle explique pourquoi, au-delà d’un stade, il est question de bâtir un complexe polyvalent permettant d’accueillir concerts et spectacles.


L’intervenant suivant est M. SIMONIN. Expert en stades, M. SIMONIN a participé à l’édification de plusieurs d’entre eux et a dirigé durant six ans le Stade de France. Il conseille également la Fédération Française de Football dans le cadre de l’organisation de l’Euro 2016. Sur ce projet, il intervient en tant que consultant auprès du RM92.

M. SIMONIN commence son intervention en précisant lui aussi que le projet n’en est, pour l’heure, qu’à l’étude de faisabilité et que rien ne pourra se concrétiser tant qu’un accord avec Nanterre, Puteaux et l’EPAD n’aura pas été trouvé. Puis il projette une succession d’images décrivant les principales caractéristiques du futur stade.

Un stade de rugby, explique M. SIMONIN, n’est utilisé que 16 jours par an pour des matches. Il faut, pour le rentabiliser, y organiser des spectacles et des événements tout au long de l’année, et donc créer un équipement polyvalent. L’idée est donc de réaliser un stade ouvert capable de se transformer en salle fermée à capacité variable («indoor/outdoor»), grâce à une toiture rétractable, à une pelouse escamotable et à une cloison coulissante permettant de «régler» la taille de la salle de spectacle, qui pourrait ainsi passer de 5 000 à 40 000 personnes. Ce stade de 35 à 40 000 places répondrait à un besoin réel, car il n’existe pas en France de salle comparable et certains concerts internationaux ne peuvent donc pas venir chez nous pour des raisons de rentabilité (le POPB est plus petit, le stade de France est beaucoup plus grand et donc plus coûteux à louer). La programmation, très éclectique, intègrerait des spectacles, des concerts classiques ou modernes, des séminaires, des salons et des expos. La surface construite comprendrait aussi 20 000 m2 de bureaux, dont la plupart seraient loués à des entreprises partenaires. Un parking de 500 places accueillerait les véhicules de leurs personnels.

Deux grandes raisons font choisir Nanterre : la présence de La Défense, dont les salariés représentent un gros public potentiel, et l’excellente desserte de transports en commun. L’existence des 10 000 places de parking des 4 Temps est elle aussi un gros atout.

L’ambition est de réaliser un stade bien intégré dans l’environnement architectural des Terrasses et de l’Arche, doté des équipements techniques les plus modernes, et bien identifiable grâce à une architecture originale qui en ferait un «monument» emblématique. L’investissement est de l’ordre de 200 millions d’Euros. Cet investissement est «relativement faible» puisque beaucoup d’infrastructures (parkings, transports…) sont déjà là. Le RM92 n’achèterait pas le stade des Bouvets et le terrain, mais les louerait à la ville de Puteaux pour une durée de 99 ans à l’issue de laquelle Puteaux récupèrerait la nouvelle installation («bail emphytéotique»). Le financement serait assuré à 50% par l’exploitation du stade, à 25% par la location des bureaux et à 25% par des accords de partenariat avec des entreprises privées.

Pour Nanterre, ce stade représenterait une réalisation de prestige contribuant à l’image de la ville. Ce serait aussi une source d’animation du quartier, la création d’emplois induits (entretien, sécurité, restauration…) et des retombées commerciales pour les commerces d’alentour (bars, brasseries…).

M. SIMONIN s’attarde un moment sur la question de la circulation. Question importante, car outre la venue des spectateurs par voiture ou par bus, les concerts et les spectacles nécessitent un matériel acheminé par de nombreux poids-lourds. Il apporte deux éléments de réponse. D’une part, il estime que 90% du public viendrait par les transports en commun. D’autre part, la circulation serait déviée du Bd Pessaro vers la bretelle D 914 située au nord du stade, où seraient aussi installées les aires de stationnement pour camions et bus. Le quartier n’aurait donc pas à souffrir d’encombrements liés à l’exploitation du stade. Quant à la sortie du public, il estime que les 40 000 spectateurs seraient évacués en 40 à 50 minutes.

Reste la question du bruit. M. SIMONIN souligne que les normes françaises en la matière sont les plus exigeantes d’Europe, et que la transformation du stade en salle fermée permettrait de réduire très considérablement les nuisances.


M. TREUTTEL, architecte des Terrasses de l’Arche, intervient à son tour pour donner quelques précisions sur la façon dont le stade serait intégré à l’urbanisme du quartier. Le concours d’architecte n’est pas lancé, et on ne sait donc pas à quoi ressemblerait le stade ; mais d’ores et déjà plusieurs contraintes sont intégrées dans le cahier des charges ou en cours de discussion pour garantir une réelle harmonie de l’ensemble. A titre personnel, il se déclare favorable au projet.

A l’issue de cette présentation, M. MARCHAL donne la parole à la salle.

Globalement, l’exposé de MM. BOUCHER et SIMONIN a été jugé très professionnel, et le sentiment général semble plutôt positif.

Une personne demande des précisions sur la programmation et les flux qu’elle entraînerait. M. SIMONIN donne les précisions suivantes, tout en soulignant qu’il ne s’agit que d’une première approche :
- 16 jours par an de matches à 30 000 personnes,
- 10 jours de «grands événements» à 40 000 personnes,
- 20 jours de concerts et spectacles à 20 000 personnes,
et le reste du temps, des «petits» événements à 5 000 personnes.

Je demande à M. SIMONIN quelles sont, d’après son expérience, les nuisances majeures subies par les riverains du Stade de France. Ce sont celles qu’il a déjà évoquées, liées au parking et au bruit. Le parking du SDF pose un problème particulier car des riverains et des commerçants habitent ou travaillent dans les zones sécurisées lors des matches et doivent donc montrer patte blanche pour rentrer chez eux… Ce ne serait pas le cas à Nanterre. Quant au bruit, la question serait réglée par la configuration «indoor» du stade.

Quelqu’un évoque le planning, la Presse ayant évoqué une livraison du stade en juillet 2013. M. SIMONIN se montre beaucoup plus réservé. En admettant qu’un accord soit trouvé (ce qui n’est pas encore le cas), il faudrait encore 18 mois de procédures diverses et 24 mois de travaux, ce qui amène au mieux à fin-2013.

Une personne souligne que, pour les habitants de la Terrasse 17, le stade serait vraiment très proche et que cela constituera une nuisance importante. Il souligne que les appartements sont en cours de commercialisation, voire déjà vendus, sans que le projet soit pour l’heure connu du public. Certes, reconnaissent M. SIMONIN et M. PERREAU-BEZOUILLE, mais la proximité du stade pourra aussi constituer un attrait et donc un argument de vente susceptible d’accroître la valeur des appartements. M. SIMONIN rappelle que, dans le cahier des charges, la façade «technique» (accès des poids-lourds, bus, etc.) serait située au nord du stade, les Terrasses donnant sur l’entrée des spectateurs. Il n’y aura donc pas de nuisances liées au va-et-vient des camions.

Une autre personne se montre très sceptique quant à la façon dont les orateurs semblent sous-estimer les problèmes de circulation. Elle souligne qu’à aujourd’hui, il suffit de deux ou trois poids-lourds pour encombrer le circulaire de La Défense et qu’autour du SDF, les jours de grands matches, la circulation est totalement bloquée. Elle semble également douter du fait que 90% des spectateurs utiliseraient les transports en commun, surtout s’ils viennent de communes (Colombes, Gennevilliers…) mal reliées à Nanterre. M. SIMONIN répond que les encombrements autour du SDF tiennent à deux facteurs : les matches de foot en semaine (la venue des spectateurs se conjugue au flux habituel des gens rentrant du travail) et les «spectacles de moteur» dont les spectateurs viennent plus facilement en voiture. Dans le cas de Nanterre, les grands événements seraient programmés en week-end, et M. SIMONIN réaffirme sa conviction de voir la très grande majorité des spectateurs venir par le RER ou le métro.

Quelqu’un pose à M. SIMONIN la question des commerces prévus autour du stade. Il n’y aura pas vraiment d’activité commerciale dans les locaux du stade, hormis la boutique du RM92, une brasserie et peut-être un restaurant «très haut-de-gamme» tenu par un chef réputé et destiné aux cadres dirigeants de La Défense ou des Terrasses. Les buvettes du stade ne vendront pas d’alcool. Il y aura donc de réelles opportunités pour des commerces existant ou créés aux alentours.

Je demande si la passerelle Chemetov, dans sa configuration actuelle, serait capable de supporter le flux de spectateurs venant de La Défense vers le stade. M. SIMONIN confirme que non, et qu'un itinéraire de doublement serait aménagé, sous la passerelle et passant entre les deux cimetières.

Une autre personne prend la parole pour souligner que la commune devra faire face à des nuisances nouvelles du fait de l’exploitation de ce stade (flux de voitures, papiers sales, dégradations diverses…) et demande si une redevance ou un dédommagement particuliers sont prévus. M. SIMONIN répond qu’il existe déjà une fiscalité qui profitera à Nanterre (taxe professionnelle, taxe sur les spectacles…) et que par ailleurs le RM92 est véritablement désireux d’instaurer avec la municipalité un réel esprit de partenariat. En particulier, il y aura un travail commun à mener sur la gestion des flux et la sécurisation des abords du stade. A cet égard, l’exemple du SDF et de la commune de Saint-Denis est intéressant. Pour les habitants, le stade est devenu «leur» stade, générateur d’emplois de service, et pendant les émeutes de décembre 2005, «il n’y a pas eu un tag sur les murs du stade».

Je pose la question de l’évaluation du nombre d’emplois que pourrait créer ce stade pour les Nanterriens. M. SIMONIN avoue qu’il a fait réaliser une étude, mais dont les résultats ne répondent pas à ma question car ils incluent les emplois des 20 000 m2 de bureaux prévus. Il est difficile de faire cette évaluation, mais c’est à coup sûr plusieurs dizaines d’emplois ETP, peut-être 40 à 50.

Quelqu’un demande quelle est la probabilité de voir ce projet prendre corps. M. SIMONIN répond que tout dépend de l’accord avec Puteaux, qui ne dépend vraiment pas de lui, mais qu’à titre personnel Nanterre est véritablement sa recommandation n° 1.

M. JARRY conclut alors la réunion. Il souligne l’intérêt pour Nanterre de ce projet, mais aussi les questions qu’il soulève (par exemple, la modification du plan local d’urbanisme), et donc la volonté de la mairie de dialoguer très en amont avec les habitants. Il explique également que la mairie de Nanterre dialogue activement avec celle de Saint-Denis pour tirer les leçons de l’implantation du SDF. Il affirme sa volonté de poser d’emblée des contraintes architecturales fortes (hauteur, alignement…), en concertation avec l’EPAD, pour préserver l’esprit du quartier des Terrasses.

La réunion se termine vers 21h15.


Ch. Romain

(1) Site officiel du Racing Métro 92 : cliquer ICI.
Photo 3 : stade "Allianz arena" de Munich.
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2 commentaires:

Estelle Le Touzé a dit…

Un grand stade à Nanterre ? Et même niché dans la zone de Seine Arche, pourquoi faire ?
Au moment où l'on remet en question une certaine idée du développement dans nos villes, au moment où les ressources d'investissement disponibles se font rares (voyez le déficit abyssal de la France pour "répondre à la crise"), peut-on raisonnablement considérer que la création d'un stade - quelle que soit sa valeur architecturale, écologique, économique (?) - est une réponse pertinente face aux enjeux enfin admis par tous : une évolution soutenable de nos sociétés ?
il y a tout à faire, tout à construire pour réduire la consommation de nos énergies, pour rendre plus efficient nos équipements et nos transports, pour développer les énergies renouvelables par la mise en place de filières industrielles à bonne échelle. Nous avons aussi à récupérer, transformer toutes les autres ressources/déchets que produit notre environnement urbain, sans compter l'urgence de former des centaines de milliers de personnes dans les métiers "verts" car il s'agit de produire intelligent et vite tout en luttant contre les ravages du chômage.
Je pourrais continuer la liste de ce qui ferait vraiment du bien à notre pays et tout particulièrement à notre "Grand Paris".
Alors, un stade ? Pour occuper le bon peuple et l'amuser ? Il y a mieux à faire et plus créatif, y compris pour (re)créer de la valeur économique.

jenny a dit…

je suis completement d'accord avec cette personne
on nous dit que ce stade sera tres accessible alors que la ligne A est surchargée actuellement et qu'elle va devoir se connecter avec eole

cet espace est bien trop petit
je crois que du temps du choix du stade de france Nanterre avait déja été sur la liste avec un emplacement au sud est de paris; ces deux emplacements avaient été abandonnés pour des raisons budgétaires et saint denis dont les terrains plus spacieux et de moindre valeur immobilière donc retenu
pourquoi ne pas exploiter l'emplacement sud est ce qui au niveau du trafic serait plus équilibré a l'antipode du centre de paris avec le stade de france il est surement plus spacieux que ce mouchoir de poche coincé entre des immeubles déja existants

avec cette crise terrible cette fois ce projet est un scandale qui n'apportera rien