dimanche 12 avril 2009

"Cité des Musées" : ce que la mairie nous prépare...




Lors de la visite des Groues organisée par la mairie, M. Jarry nous a une nouvelle fois servi son superbe projet d’un complexe d’entreposage et de restauration d’œuvres d’art baptisé « Cité des Musées ». Une fois encore, il nous faut dénoncer ce projet sans réel intérêt pour Nanterre, alors que les terrains promis à ces hangars pourraient accueillir les logements dont notre ville manque tant.

Comme certains nous accusent de noircir le tableau, affirment la vocation "culturelle" de la chose et soutiennent qu'il s'agit d'apporter l'Art à Nanterre, le mieux pour se faire une idée est de se reporter à la (coûteuse) plaquette éditée par M. Jarry pour défendre son projet, et que l’on peut télécharger sur le site : http://www.seine-arche.fr/news/latest/nanterre-souhaite-accueillir-le-patrimoine-national.html (au passage, on se rappellera que si, comme le titre l’affirme, « Nanterre souhaite accueillir etc. », les Nanterriens n’ont, à ma connaissance, jamais été consultés sur le sujet !

A lire cette plaquette, on ne peut que se rendre à l'évidence : le projet "Cité des Musées" n'est qu'un projet de hangars, de laboratoires et de plate-forme logistique, emballé dans de grands mots vides destinés à faire passer la pilule !

Quelques exemples ? C’est facile…

Veut-on d’abord avoir une idée de la philosophie générale du projet ? Ouvrons la plaquette de la mairie en page 7 : «Le projet s’articule à deux échelles, celle du site de l’île ferroviaire dédié exclusivement à la conservation, la restauration et la recherche et celle du projet urbain au service du Centre de conservation, de recherche et de restauration du patrimoine dont la programmation urbaine sera issue, pour partie, des attentes de cet équipement.»
Donc, c’est clair, les deux axes sont, pour le premier : le centre dédié à la conservation, la restauration et la recherche, et pour le second : projet urbain au service de la conservation, de la recherche et de la restauration. Excusez-moi si je ne vois pas bien ce qui les différencie… Et pour être plus précis, traduisons en français. «Conservation» veut dire «chambres fortes et entrepôts de stockage», «restauration» veut dire «laboratoires et salles blanches à activité hautement spécialisée» et «recherche» veut dire «activité de laboratoire, de bureau ou de campus».
Quant à la phrase «la programmation urbaine sera issue des attentes de cet équipement», elle signifie simplement qu’on aménagera la ville autour du centre au lieu d’inscrire le centre dans la ville. Par exemple, si le centre nécessite un important trafic de camions, eh bien on fera des routes et des parkings pour ces camions…


Peut-être se demande-t-on où se situerait ce superbe complexe de hangars, de laboratoires et d’entrepôts ? La réponse est dans la plaquette, en page 8. Il serait construit, donc, dans la zone des Groues, sur l’endroit appelé «l’île ferroviaire». Description : «L’île ferroviaire se développe sur 6,6 hectares (…) Enfin, l’île ferroviaire bénéficie d’une desserte exceptionnelle.Elle se situe à 5 mn environ de la gare Nanterre-Université accueillant le RER A et le Transilien.» Faut-il rappeler que lundi 24 novembre 2008, lors de la réunion organisée par la mairie sur l’évolution de l’EPASA, Mme Fraysse elle-même dénonçait le manque de logements à Nanterre ? 6,6 hectares, c’est la surface nécessaire pour bâtir une résidence de 450 à 500 logements comme celles de Central Parc ou du Liberté. Ce genre de construction ne serait-il pas un peu plus urgent pour Nanterre que des hangars à tableaux ou des laboratoires de réparation de sculptures ?

A la même réunion du 24 novembre, M. Chanut, maire-adjoint en charge des transports, dénonçait avec raison l’engorgement des transports sur Nanterre, à commencer par le RER A. Or, ce brillant projet de «Cité des Musées»va accroître le problème, d’une part avec les camions de la société CHENUE SA (voir plus bas), d’autre part avec la venue quotidienne des gens travaillant dans ce centre. Et que dit la plaquette de la mairie sur cette question des transports ? Elle est d’une précision admirable : «Cette gare (Nanterre-Université) va, dans le cadre du projet Seine Arche, faire l’objet d’une reconstruction complète au sein d’un pôle multimodal (p. 9)» ; «C’est aussi à plus long terme,la réalisation d’une autre gare sur les Groues accueillant une station de la ligne Eole prolongée depuis Saint Lazare. (p. 9)» ; «un renforcement très conséquent, au cours des prochaines années, de la desserte en transports en commun (p. 10)». «Va faire», «à plus long terme», «très conséquent» «au cours des prochaines années»… Pas un chiffre, pas une date, pas un engagement précis !

Ah mais, nous dit-on, c’est un vaste projet incluant de nombreuses activités… Voyons donc. Sur 15 pages de description, on trouve égaré en page 10 ce modeste paragraphe : «un projet qui contribue au développement économique en faisant émerger un pôle d’excellence centré sur l’œuvre d’art accueillant des restaurateurs, des galeries, des fondations, des salles de vente, des maisons d’édition…» Non mais sans blague ? Des galeries ? Des salles de vente ? Alors que depuis trente ans la mairie n’a pas été capable de construire cette fameuse salle de spectacle, ce «Zénith» dont le projet ressort comme un serpent de mer à chaque nouvelle campagne pour les Municipales ? A qui veut-on faire avaler ça ? Et quant aux maisons d’édition, à supposer que deux ou trois d’entre elles viennent s’installer à Nanterre, ça ne fera jamais que quelques bureaux de plus. En quoi le siège social d’une maison d’édition contribue-t-il au rayonnement culturel de l’endroit où il s’installe ? Pour y avoir travaillé, je peux témoigner que le siège social d’une maison d’édition fonctionne exactement comme celui de n’importe quelle autre entreprise, ni plus, ni moins.

Mais continuons à lire… Toujours page 10, nous apprenons que «Le projet urbain prévoit également l’implantation de logements, d’équipements, d’activités et de services pour les usagers de ce Centre.» Bonne nouvelle donc : il y aura des restaurants, des agences bancaires, des opticiens et des coiffeurs pour les gens qui travailleront dans les laboratoires ou les entrepôts du centre. Exactement comme il y en a aujourd’hui autour des terrasses d’Axa. Vous savez bien : ceux qui sont fermés le week-end et où les Nanterriens ne mettent jamais les pieds... il y aura aussi, nous dit la mairie, «des logements». Combien, où, à quel prix… là encore, la précision est de mise. Du reste, ce mot de «logement» n’apparaît qu’une fois dans toute la plaquette. Sans doute le rédacteur a-t-il préféré éviter les sujets qui fâchent…

Par contre, sur les camions et la logistique, on trouve une bonne demi-page, avec la présentation en page 14 de la société partenaire : «La société A.CHENUE SA, un des leaders mondiaux de la logistique des œuvres d’art, s’est montré intéressée pour participer à cette dynamique économique et s’implanter à proximité du Centre de conservation, de recherche et de restauration du patrimoine.» Je n’ai rien contre cette entreprise, mais ceux qui veulent savoir de quoi il retourne peuvent se rendre sur le site www.chenue.com. Ils pourront juger par eux-mêmes si nous avons tort d’évoquer des allers-retours importants de camionnettes et de camions !

Enfin, dernier point de la plaquette municipale, l’évocation d’un partenariat avec l’Université Paris X qui, est-il écrit en page 12, «s'engage à aider à la politique de recherche dans le domaine de la conservation et de la restauration et à contribuer à la programmation, à l’organisation d’expositions-dossiers dans le nouveau Centre de conservation, de recherche et de restauration du Patrimoine». La bonne nouvelle, cette fois, c’est qu’après plus de quarante ans de cohabitation, la municipalité de Nanterre s’avise enfin qu’il y a une université de 32 000 étudiants sur son territoire et qu’il y a peut-être des partenariats à monter. Mais pour le reste, chacun sait à quel point l’éducation et donc les facs manquent de moyens financiers. Je n’imagine donc pas très bien comment ce partenariat pourra avoir des retombées économiques importantes pour notre ville. Par ailleurs, j’imagine encore moins en quoi la création de cours sur l’histoire de l’Art ou la restauration de tableaux pourra aider les jeunes de notre ville à s’insérer massivement dans la vie professionnelle. Prétendre le contraire, c’est véritablement se moquer du monde !

Au final, si on la lit attentivement, cette plaquette confirme abondamment les propos de ceux qui dénoncent un vaste complexe de stockage et d’entreposage de tableaux sans véritable intérêt pour les Nanterriens. Que chacun en soit bien conscient : malgré son nom trompeur, CE PROJET NE PREVOIT ABSOLUMENT PAS DE CONSTRUIRE A NANTERRE LE MOINDRE MUSEE ! J’invite donc tous ceux qui s’intéressent à cette question à télécharger et à lire ladite plaquette pour constater par eux-mêmes à quoi la municipalité veut consacrer des hectares disponibles, alors que notre ville manque si cruellement de logements de toutes sortes.


Ch. Romain
http://www.seine-arche.fr/news/latest/nanterre-souhaite-accueillir-le-patrimoine-national.html

1 commentaire:

Anonyme a dit…

merci, Monsieur Romain, d'avoir dégonflé la baudruche avec cette longue mais précise analyse du projet présenté par la mairie comme formidablement innovant et requalifiant Nanterre.
Décidément, après les bureaux d'AXA, les pelouses presque galeuses dites "terrasses", d'un projet urbain vraiment pauvre en création de vie et d'échanges humains, nous voici affublés d'un projet de stockage ... d'oeuvres, certes mais de stockage et avec des norias de camions à prévoir, bien évidemment.
Pauvre Nanterre pénalisée par l'absence totale de créativité de ses élus mentalement trop anciens. Alors, c'est quand que vous changez tout ça ?