lundi 15 juin 2009

FN à Nanterre : un an déjà…

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Voilà plus d’un an, le 17 mai 2008, le débat «Pour ou contre l’éviction du FN de Nanterre ?» culminait avec l’organisation d’une manifestation menée par Patrick Jarry autour des locaux du Front national, rue des Suisses.

Rappelons le contexte : miné par les difficultés financières, le parti de Jean-Marie Le Pen avait dû se résoudre à vendre son bâtiment historique des hauteurs de Saint-Cloud et à déménager. Son choix s’était porté sur des locaux situés à Nanterre, rue des Suisses. Un choix dicté par des critères de prix, de proximité et peut-être aussi, ce n’est pas impossible, par la volonté de s’implanter en «terre de conquête».

Très vite, M. Jarry était monté au créneau, roulant tambour et grosse caisse dans les médias en criant à la provocation et en appelant à faire barrage «par tous les moyens» au Front national. Toutefois, il refusait en même temps de donner suite aux propositions formulées par Jean-Baptiste Matray (élu du groupe MoDem) qui suggérait de prendre contact avec le bailleur pour tenter de faire accorder la location des locaux à la ville. La majorité municipale refusa même de voter un amendement dans ce sens proposé par le groupe MoDem ! A ce moyen vraisemblablement efficace d’empêcher l’installation du FN, M. Jarry préférait les rodomontades, l’agitation médiatique et l’appel à la «mobilisation citoyenne».

Dans une partie de la population et dans la «blogosphère» locale, le débat tournait autour de la question : «Faut-il ou non chercher à interdire cette installation ?». Les tenants du Oui prônaient que le FN n’est pas un parti comme les autres et que son installation à Nanterre, outre la «provocation» qu’elle pouvait représenter, ne manquerait pas de créer troubles, agitation et nuisances dans une ville historiquement et culturellement de gauche. Les tenants du Non (dont j’étais et dont je reste) rappelaient que le FN, qu’on le veuille ou non, est pour l’heure un parti légal et qu’à ce titre il est anti-démocratique de vouloir l’empêcher d’agir comme n’importe quel autre parti en s’installant où bon lui semble.

Le 17 mai 2008, une manifestation était donc organisée. Malgré de nombreux appels de la mairie et une campagne d’affichage, la participation nanterrienne était assez faible et les organisateurs avaient jugé utile de faire venir par camionnette des supplétifs de Paris (entre autres, des militants prêtés par la CGT ou par la LCR). Au final, entre 400 et 500 personnes, élus CIC en tête, défilèrent dans une manifestation mêlant slogans anti-FN et appels à la régularisation de tous les sans-papiers (1) avant que le cortège ne se disperse à environ cinq cents mètres des locaux concernés. Il y eu, semble-t-il, une échauffourée entre quelques frontistes et quelques manifestants, mais rien de bien notable. L’événement, relativement piteux, laissa nombre de participants sur leur faim (2). Puis, le soufflé retomba.

Et depuis ? Eh bien, depuis, rien. Un an plus tard, les scènes d’effroi et d’horreur prophétisées par certains ne se sont jamais produites. Le FN semble faire preuve à Nanterre d’une discrétion de violette et, même au cours de cette campagne pour les Européennes, son activité militante a été quasi-nulle (3). Tout semble donc bien confirmer que le soufflé monté par la Mairie n’était qu’une opération de com’ destinée à mobiliser artificiellement les Nanterriens derrière leur municipalité, dans un réflexe de «petit village gaulois». Une démarche qui rappelle un peu celle menée, sur une beaucoup plus grande échelle, à propos des «menaces pour Nanterre de l’extension de La Défense»

Quant au fond, je persiste à penser qu’en démocratie la lutte doit se faire au niveau des idées et du débat plutôt que dans l’affrontement physique ou l’interdiction. Les idées véhiculées par le Front national sont détestables, comme sont détestables celles véhiculées de façon symétrique par la liste Dieudonné au cours de ces élections européennes. N’empêche que, à Nanterre, le FN a obtenu 4,51% des voix et Dieudonné, juste derrière, 3,56%. Alors que deux électeurs sur trois restaient chez eux, près de 1 300 Nanterriens sont allés aux urnes pour cautionner les prises de position de M. Le Pen ou d’une «liste antisioniste» ! C’est cela qui devrait interpeller la mairie, et interpeller chacun de nous.


Ch. Romain

(1) : vidéo de la manifestation réalisée par Rue89.
(2) : courrier adressé à M. Jarry par l'une des organisations participantes.
(3) : témoignage d'un Nanterrien sur l'activité militante du FN à Nanterre.
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